Une entrée en matière
Alors que la plupart des visiteurs se font déposer devant la chaussée qui mène à l’enceinte du temple, nous demandons à notre chauffeur de tuk-tuk de nous arrêter cent cinquante mètres avant l’entrée, en bordure des douves. Un petit sentier qui caracole le long de l’eau permet de s’imprégner du site en toute quiétude avant d’être avaler par le flot des visiteurs qui se précipitent à l’entrée. Les reflets des murs d’enceinte dans l’eau des douves sont de toute beauté et participent à donner au lieu cette impression de sérénité.
Le mythe fondateur du serpent nâga
La grande chaussée qui mène en droite ligne vers l’entrée principale d’Angkor Wat est bordée des deux côtés par une rampe de pierre figurant le serpent nâga. Cette représentation est omniprésente dans tous les temples khmers. Elle fait référence à l’un des mythes fondateurs du royaume.(voir ci-contre)
Mémoires sur les coutumes du Cambodge
Extrait des commentaires rédigés par Tcheou Ta-kouan vers 1300.
En 1296, Tcheou Ta-kouan accompagne une délégation chinoise qui séjournera près d’une année au Cambodge. De retour en Chine, il rédige ses mémoires dont voici un extrait:
« J’ai entendu dire que le palais regorgeait de grandes merveilles; mais les gardes sont très sévères, et il ne m’a pas été possible de les voir.
Pour ce qui est de la Tour d’or, à l’intérieur du palais, le roi va coucher la nuit à son sommet. Les indigènes prétendent que dans la tour, il y a un esprit qui est un serpent à neuf têtes, maître des terres du royaume. Cet esprit apparaît chaque nuit sous la forme d’une femme-serpent.
C’est avec elle que le souverain s’unit. Même les épouses du roi n’oseraient pénétrer dans la pièce.
Après la seconde nuit de veille, le roi réapparaît et peut alors dormir avec ses épouses et ses concubines. Si une nuit l’esprit n’apparaît pas, c’est que le temps de la mort du roi est venu. Si le roi manque à un seul de ses rendez-vous nocturnes, il faut se préparer à un grand malheur. »
Le commentaire de l’envoyé chinois évoque ce que l’on pourrait appeler le mythe fondateur du royaume khmer. Un prince étranger s’empare du pays en épousant par la force une princesse-serpent. Ce mythe illustre également la perpétuelle renaissance du royaume qui émerge des eaux après chaque inondation. Le serpent nâga est associé au monde aquatique.
Sources: Mémoires sur les coutumes du Cambodge de Tcheou Ta-Kouan
Librairies d’Amérique et d’Orient, Adrien Maisonneuve – 1951
C’est avec elle que le souverain s’unit. Même les épouses du roi n’oseraient pénétrer dans la pièce.
Après la seconde nuit de veille, le roi réapparaît et peut alors dormir avec ses épouses et ses concubines. Si une nuit l’esprit n’apparaît pas, c’est que le temps de la mort du roi est venu. Si le roi manque à un seul de ses rendez-vous nocturnes, il faut se préparer à un grand malheur. »
Sources: Mémoires sur les coutumes du Cambodge de Tcheou Ta-Kouan
Librairies d’Amérique et d’Orient, Adrien Maisonneuve – 1951