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Musée ethnographique de Genève: les rois mochica – Divinité et pouvoir dans le Pérou ancien

L’origine du projet

L’exposition « Les rois mochica » fut initiée par la découverte d’une tombe sur le site de Huaca el Pueblo en 2008. Cette sépulture contenait la dépouille d’un haut dignitaire.

Il était entouré de trois autres corps et d’une grande quantité d’objets. De ce site, les archéologues ont exhumé quelque 200 artéfacts, dont 170 objets en or, en argent et en cuivre argenté ou doré. On relève également des colliers constitués de plaques de coquillages marins et de nombreux objets en céramique.

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L’ensemble de cette collection fut tout d’abord stocké dans une chambre sécurisée du Musée Tumbas Reales de Sipán, situé dans la ville de Lambayeque ( Pérou)

Voir notre visite du Musée de Lambayeque dans la section Pérou.

Durant quatre années, un minutieux travail de restauration a été entrepris sur les différentes pièces de la collection grâce à un apport financier de l’Office fédéral de la culture à Berne.

Entrée en matière

L
e parcours se décline en plusieurs sections thématiques qui permettent une initiation progressive à la civilisation mochica.
Localisation des sites mochica – Les symboles du pouvoir – L’exercice du pouvoir et l’équilibre naturel – Les acteurs du rituel – Les sacrifices humains – La tombe du Seigneur d’Ucupe – L’architecture mochica.

Dès l’entrée, une projection sur l’un des murs nous dévoile le cadre géographique dans lequel s’est développé la culture mochica. Le paysage aride de la côte nord du Pérou défile sous nos yeux comme si nous étions à bord d’une embarcation.

Si la côte est un véritable désert, on observe des regroupements humains à proximité des cours d’eau.
La zone littorale est l’une des plus riches au monde grâce au courant froid de Humboldt, venu de l’Antarctique, qui favorise le développement du plancton qui attire les poissons, faisant de cette bordure pacifique l’une des régions les plus poissonneuse au monde.
La faune marine exceptionnelle entraîne la présence de nombreuses colonies d’oiseaux marins qui produisent un fertilisant naturel : le «guano».

Cette proximité avec l’Océan aura une influence sur les symboles qui alimentent l’iconographie mochica (poulpe, crabe, raie, …).

Faisant face à ce décor animé, une vitrine renferme un objet étrange. Il s’agit d’un tumi, couteau à lame semi-circulaire qui était utilisé au cours des rituels de sacrifice (il servait à égorger la victime). Le tumi était un objet de pouvoir que certains hauts dignitaires de la société mochica portaient à la ceinture.

Voir notre article sur le Seigneur de Sipan

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Section 1 : Les Mochica, culture andine

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[1] Guerrier captif – [2] Guerrier Mochica tenant une massue – [3] Bouteille à anse en étrier en forme de tête

Du 1er au 8ème siècle de notre ère la culture mochica va donc se développer sur une bande du littoral péruvien d’environ 500 kilomètres de long et connaîtra son apogée autour du 6ème siècle.

L’avènement des Mochica s’inscrit dans une lente progression d’occupation des terres côtières par des populations successives.

Comme d’autres peuples de la côte (Nasca, Paracas) à la même époque, les Moche développent une agriculture basée sur les cultures de la courge, des haricots et du maïs grâce à un système d’irrigation élaboré. Parallèlement, ils produisent une grande quantité de céramiques, technique qu’il maîtrisent parfaitement.

Ces productions, bases d’une économie florissante ont conduit les Mochica à s’organiser en une société hiérarchisée avec de hauts dignitaires qui détiennent un pouvoir magique capable de maintenir l’équilibre du monde, des prêtres gardiens des rituels, des guerriers, des artisans, des agriculteurs et des pêcheurs. On se trouve sans doute devant la première société andine à s’être doté d’une organisation étatique.

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Bouteille montrant un pêcheur de raie

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Section 2 : Les symboles du pouvoir

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L’araignée – Le poulpe – Le hibou – L’Être à crocs

La société Mochica était une société sans écriture. C’est donc essentiellement à travers ses représentations visuelles que nous pouvons explorer sa culture et tenter de découvrir le sens symbolique des motifs récurrents. Au cours de cérémonies rituelles les hauts dignitaires qui détiennent le pouvoir revêtent les attributs de trois grands prédateurs: le hibou qui a la maîtrise du ciel, l’araignée qui domine la terre et poulpe qui règne dans les mers.

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Pour symboliser leur pouvoir, les élites mochica se sont inspirées d’êtres surnaturels, nommés «Êtres à crocs», qui étaient représentés, mille ans avant eux, sur les bas-reliefs des temples de la culture Cupisnique.
Ces personnages sont régulièrement représentés en céramique.

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Section 3 : Les rituels

L
a violence est présente dans toute l’iconographie mochica. Elle est l’une des composantes les plus importantes de cette culture. Elle s’illustre au cours d’actes rituels très précis: le combat, le traitement des captifs, le sacrifice. Les deux rituels majeurs sont ceux du Sacrifice en Montagne et de la Cérémonie du Sacrifice.

Ces rites mettent en scène différents acteurs: le sacrifié, l’Être à crocs et son Assistant-Iguane, un Être chauve-souris qui récolte le sang de la victime. Les archéologues ont également mis en évidence d’autres personnages représentés dans les céramiques mochica.

Des animaux hybrides à corps humain, se retrouvent dans des scènes de sacrifice. Ils sont principalement zoomorphes. Ils tiennent souvent un large couteau sacrificiel (tumi) et agrippent une tête humaine par les cheveux. Avec l’Être à crocs, ils symbolisent le pouvoir divin et ancestral.

D’autres personnages apparaissent dans les représentations. Ils ont le visage mutilé par la maladie. Ils souffrent en fait de la leishmaniose qui est transmise par des insectes qui infestent les eaux stagnantes.
Les malheureux ressemblent à des morts-vivants.
Ce groupe d’individus semble jouer un rôle au cours des rituels funéraires.

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Section 4 : Les sacrifices humains

L
es archéologues ont découverts de nombreuses représentations de sacrifices humains dans des sépultures et des enceintes de temples. Les scènes de sacrifices se retrouvent sur les céramiques disposées dans les tombes et sur les fresques murales des temples.

Les rites sacrificiels étaient particulièrement cruels et violents. Des guerriers sont dévorés par des félins, des hommes et des femmes sont déchiquetés par des vautours, tandis que d’autres sont attachés à des cadres sacrificiels. Les deux rituels les plus importants et les plus complexes sont ceux du Sacrifice en Montagne et de la Cérémonie du Sacrifice.

Exposition Mochica au MEG

Céramique représentant le Sacrifice en Montagne. L’Être à crocs se trouve à l’extrême gauche de la scène.

Exposition Mochica au MEG

Certains captifs sont attachés à des cadres sacrificiels

Le Sacrifice en Montagne

Les scènes du Sacrifice en Montagne représentent l’Être à crocs et son Assistant-Iguane précipitant un captif du sommet d’une montagne.

Au fil du temps, ce rituel va se complexifier et multiplier le nombre de victimes.

Désormais les « sacrifiés » porteront des cerfs de Virginie dans leurs bras, associant ainsi le sacrifice à la Chasse rituelle.

La Cérémonie du Sacrifice

La Cérémonie du Sacrifice, date du sixième siècle et constitue le rituel qui rassemble le plus d’intervenants revêtus des attributs liés à leur rang.
Lors de cette Cérémonie, le dirigeant officie sous les traits d’un Être à crocs en pratiquant l’égorgement de deux victimes tandis que ses assistants se chargent de récupérer leur sang dans des coupes.

Les lettres – A, B, C, D, E – ont été assignées aux principaux acteurs au milieu des années 1970 afin de faciliter leur identification.

culture Mochica

Section 5 : La tombe du Seigneur d’Ucupe

En 2008, Steve Bourget et Bruno Alva Meneses découvrent sur le site archéologique de Huaca el Pueblo au Pérou, la sépulture d’un haut dignitaire mochica.

La population locale le baptise aussitôt «El Señor de Ucupe».

La tombe recèle plus de 170 objets, dont de nombreux en or, en argent et en cuivre. Parmi eux, trois masques funéraires, 11 couronnes, dix diadèmes et des armes.

Outre ces objets, le défunt était entouré des dépouilles de deux hommes et d’une femme enceinte de six mois.

Les fouilles ont permis de rassembler suffisamment d’indices pour établir que le Seigneur d’Ucupe devait être le dirigeant principal de son époque.

Celui qui prend place sur un trône et à qui l’on présente le sang du captif égorgé.

Ci à droite: les fouilles en cours sur le site de Huaca el Pueblo

Fouilles Seigneur d'Ucupe

Dérouler la galerie à l’aide de l’ascenseur >

Seigneur d'Ucupe
Tombe du Seigneur d'Ucupe
Restauration des masques funéraires du Seigneur d’Ucupe

Photographies

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